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Khadija Zamouri : l'égalité des chances dans l'enseignement, plus que jamais d'actualité




Le ministre flamand de l'enseignement, Ben Weyts, met l'accent sur le néerlandais et les mathématiques en fixant de nouveaux objectifs minimums. En outre, seul le néerlandais pourra encore être parlé à l'école, y compris pendant la récréation. Il espère ainsi inverser la tendance à la baisse de la qualité de l'enseignement. Une hypothèse farfelue ? Ou bien l'égalité des chances en matière d'éducation est-elle mise à mal ?

Il y a 21 ans, la ministre flamande libérale de l'enseignement, Marleen Vanderpoorten, a instauré le décret GOK (gelijkekansenonderwijs-enseignement égalité des chances). Nous en sommes encore fiers. Le décret GOK a entraîné un changement culturel. Il ne s'agissait plus des choix de l'école, mais de ceux des enfants et de leurs parents. Si nous voulons que notre société soit "à armes égales", l'égalité des chances en matière d'éducation est la condition sine qua non.

"Les élèves de 12 ans obtiennent de moins bons résultats en mathématiques et en ICT" - VRT NWS, 1er juin 2022

"Le niveau de compréhension en lecture des élèves flamands de quatrième année s'est à nouveau fortement dégradé" - VRT NWS, 16 mai 2023

"La qualité de notre enseignement diminue depuis 20 ans" - Ben Weyts, ministre flamand de l'enseignement

Ce n'est qu'un petit échantillon des gros titres, mais la nouvelle tendance est perceptible. Il n'est plus question d'égalité des chances, mais du "déclin" de l'enseignement flamand. L'enseignement est sous pression, la qualité doit augmenter. Bien sûr, la qualité est essentielle. En même temps, nous entendons de plus en plus souvent l'appel à "laisser les élèves exceller". Les élèves "forts" doivent se voir offrir davantage de possibilités de développement... ils ne doivent pas être "freinés", c'est-à-dire freinés par les élèves "faibles". Parfois, la politique GOK est aussi explicitement désignée comme étant la cause de la détérioration des résultats. L'égalité des chances en matière d'éducation est ainsi opposée à un niveau d'éducation élevé. Il s'agit là d'une fausse dichotomie. Des pays comme le Danemark, le Canada et l'Estonie, entre autres, montrent qu'une plus grande égalité dans l'éducation peut parfaitement coexister avec une qualité élevée de l'enseignement.

Élèves défavorisés

Le décret flamands GOK n'est donc pas sorti de nulle part. L'enseignement flamand n'a jamais été l'un des meilleurs d'Europe en termes d'égalité des chances. Les résultats scolaires y sont plus fortement déterminés par l'origine socio-économique et le statut migratoire qu'ailleurs. L'écart entre les 20 % d'élèves les plus performants et les 10 % les moins performants est le plus important de tous les pays de l'OCDE. Le GOK reste une priorité sociétale et ne s'oppose pas à une éducation de qualité. Au contraire, le GOK  devraint également permettre d'élever la moyenne générale.

L'évolution de la société

La société change, l'éducation doit s'y adapter. À Bruxelles, nous avons été les premiers à connaître une diversité croissante. Cette évolution vers une société cosmopolite et hyperdiversifiée s'étend à la périphérie, aux grandes et petites villes, à l'ensemble de la Belgique. Les villes, mais aussi le Vlaamse Rand, rajeunissent et se diversifient, selon l'étude de la VUB intitulée "Young people in the Rand" (Les jeunes dans le Rand). Avant-hier (20/8/2023), le "BuG 534 - Bericht uit het Gewisse" du sociologue de la KUL Jan Hertogen est tombé dans les boites mails.  37,3% soit 4,3 millions de Belges ont une origine non belge dans notre pays. Dans les villes, ce chiffre est souvent supérieur à 50 %. Dans mon Molenbeek, c'est même 95 %.


Les organisations d'employeurs et de travailleurs rappellent l'importance d'une immigration réussie pour notre économie et notre prospérité. "Nous considérons l'immigration économique à la fois comme un atout et comme une nécessité pour résoudre les tensions sur le marché du travail. Car pour Voka, ce n'est pas l'origine qui compte, mais l'avenir", écrit Hans Maertens, directeur général de Voka. C'est le défi auquel est confronté l'enseignement dans l'ensemble du pays, et pas seulement dans quelques villes : Le GOK n'y met pas un frein, mais en fait partie. À Bruxelles, nous avons adapté notre enseignement en procédant par essais et erreurs. Nous avons fait du multilinguisme et de la diversité un atout, par exemple.


Vers une plus grande égalité des chances en matière d'éducation

L'abandon progressif de la politique GOK semble en partie déjà en cours. Il suffit d'observer la réduction effective de la priorité accordée aux élèves des écoles, introduite l'année dernière. Jeter les GOK par-dessus bord est un choix de société insupportable. À contre-courant de la tendance, en ce début d'année scolaire, voici un appel à renforcer le GOK : réduire l'enseignement obligatoire à trois ans, en suivant l'exemple francophone, adapter les vacances scolaires dans l'enseignement néerlandophone également, développer l'apprentissage dual en collaboration avec les employeurs parce que la fatigue scolaire n'est pas la même que la fatigue d'apprentissage, lutter contre les boîtes à tartines vides, développer systématiquement des "Brede School"(école au sens large) dans nos villes, récompenser les enseignants qui viennent enseigner dans nos villes et notre périphérie urbaine, plus et pas moins d'enseignement inclusif pour les personnes handicapées, ... donc passer à la vitesse supérieure en termes de GOK. Je l'admets, un libéral n'est pas opposé à la méritocratie et à la concurrence, mais sur un pied d'égalité, avec des chances égales en matière d'éducation.

 

Khadija Zamouri

Députée bruxelloise